La réunion, qui s’est tenue le 23 juillet, était présidée par Maud FAIPOUX, directrice de la DGAL, accompagnée de Pierre AUBERT, chef du service des actions sanitaires. Olivier DEBAERE, directeur de crise, était excusé car déjà en réunion sur ce dossier.
La CFDT était représentée par Anne JAMMES, Anne BERTOMEU et Frédric LALOY.
Une maladie émergente
Maud FAIPOUX apporte en introduction quelques éléments d’analyse sur cette maladie. La dermatose nodulaire contagieuse (DNC) n’est pas transmissible à l’homme. Inconnue jusqu’à présent en France, cette maladie de catégorie A, touchant les bovins, conduit l’administration à des mesures drastiques : proscription de tous les mouvements d’animaux dans un rayon de 50 kilomètres autour de chaque foyer (zone réglementée), obligation d’abattage total pour chaque foyer détecté. L’objectif est d’éviter une extension géographique incontrôlable des foyers. En complément, la campagne de vaccination des bovins, prévue pour 400 000 animaux, a commencé vendredi 18 juillet. Toutefois, la vaccination seule ne permettra pas une éradication de la maladie. En effet, 21 jours sont nécessaires pour que les animaux vaccinés soient protégés. Il est donc possible que de nouveaux foyers surviennent dans des élevages après vaccination. Dans ce cas, il faudra également recourir à l’abattage total.
Le jour de la réunion, il y avait 34 foyers dans les départements 73 et 74, mais le 01 et le 38 sont aussi déjà impactés par les mesures prises.
Organisation de la DGAL, répartition des rôles entre les DDPP impactées et la DRAAF AURA
La cellule de crise est activée. Olivier DEBAERE, directeur de crise, est en contact quotidien par téléphone avec les DDPP impactées et la DRAAF AURA, et des réunions ont lieu très régulièrement. Un appui technique et juridique est mobilisé côté DGAL, en particulier pour apporter une assistance lorsque les décisions d’abattage sont contestées devant un tribunal administratif.
Les deux directions départementales sont en charge des aspects techniques (suivi des foyers, logistique liée à la vaccination…). La DRAAF AURA gère, outre l’ensemble du volet relatif aux indemnisations, l’organisation logistique humaine de recensement et d’envoi de renforts, pour soutenir en permanence les équipes sur le terrain et permettre aux agents fortement mobilisés sur place de prendre les pauses nécessaires.
La CFDT-Agriculture reconnaît la montée en professionnalisation dans la gestion de crise du MASA, liée à l’expérience acquise lors d’épisodes précédents de crises sanitaires, ainsi que la mise en œuvre de mesures plus réactives que précédemment.
La CFDT attend de la ministre un discours de fermeté dans les médias face aux violences inacceptables envers les collègues
Les abattages de bovins ont conduit plusieurs syndicats agricoles à s’exprimer, mais aussi à bloquer l’accès aux élevages et à contester au tribunal administratif les décisions d’abattage total sur la base d’allégations mensongères. Sur ce dernier point, un jugement rendu le week-end dernier a donné raison à l’administration.
Maud FAIPOUX précise que le discours de la ministre en charge de l’agriculture a été très clair lors du CNOPSAV (Comité national d’orientation de la politique sanitaire animale et vétérinaire) exceptionnel, qui vient d’avoir lieu sur le sujet.
Au-delà du soutien aux agents lors de son déplacement en Savoie le 24 juillet, la CFDT-Agriculture attend de sa part un discours très clair dans les médias : l’abattage total de chaque foyer est obligatoire et une tolérance zéro s’impose vis-à-vis de toute agression envers les agents de son ministère. Si, pour notre organisation syndicale, la détresse des éleveurs qui voient leur cheptel abattu est pleinement compréhensible, toute violence physique ou verbale envers des agents du MASA est complètement inacceptable.
… mais aussi un meilleur accompagnement par l’administration des agents agressés
Maud FAIPOUX indique que les agents en DDPP ne vont pas seuls dans les élevages. Ils sont généralement accompagnés par la MSA, par des éleveurs du groupement de défense sanitaire ou de la chambre d’agriculture. Les agents en contact avec les éleveurs impactés, sur le terrain ou au bureau, peuvent bénéficier d’un soutien psychologique.
Elle a connaissance des cas, transmis par ailleurs dans le courrier de la CFDT-Agriculture pour demander la tenue de cette réunion, « d’équipes qui ont été bousculées verbalement, presque physiquement ». Elle confirme qu’il y a dépôt de plainte et main courante, dès lors que des agents sont malmenés dans l’exercice de leur fonction.
La CFDT-Agriculture se félicite du soutien marqué apporté aux équipes des DDPP 73 et 74 par les préfètes de chaque département. Elle réitère formellement sa demande d’accompagnement par sa direction pour tout agent concerné par une agression, physique, verbale, ou sur les réseaux sociaux. De même, chaque opposition à fonction doit faire l’objet d’un signalement au procureur, tel qu’il est prévu réglementairement.
Violence verbale, mise à mort des animaux, heures supplémentaires… des collègues déjà éprouvés, et ce n’est que le début !
Outre la violence verbale des agriculteurs en détresse, et le stress généré par la situation sanitaire, les agents qui participent au dépeuplement des foyers (abattage, manutention, enlèvement des animaux…) et au suivi documentaire vivent pour certains difficilement la situation. Certains d’entre eux font état, alors que la crise n’a débuté qu’en juin, d’une intense fatigue physique et mentale, liée également aux heures supplémentaires induites par la charge accrue de travail.
S’il est aujourd’hui impossible de dire combien de temps va durer la crise, l’administration convient que le pic durera au mieux quelques mois, et peut-être bien davantage. Et ce, sans parler du travail post crise (règles de mouvements, de certification…), certes moindre, mais dont on ne peut pas mesurer à l’heure actuelle sur quelle période il s’étendra.
Aussi, l’ensemble des organisations syndicales demande :
- Une mobilisation de l’ensemble des acteurs de prévention : assistants de prévention, médecine de prévention, ISST, etc… y compris pour les volontaires qui reviennent dans leur structure après une période effectuée en renfort,
- La mobilisation des IGAPS dès à présent afin d’être en mesure d’accompagner ensuite les agents en matière d’avancement, de mobilité, de prime…
La DGAL s’est montrée attentive à ces demandes.
Pour la CFDT-Agriculture, il est urgent que les mesures d’accompagnement adaptées soient mises en place au plus vite, y compris pour les agents intervenant en renfort. Notre organisation syndicale veillera à ce que cela soit suivi de mesures adaptées, et que cet accompagnement dure autant que de besoin pour les agents impactés.
Des renforts en moyens humains… en nombre vraiment suffisant ?
En termes de renforts en moyens humains, la DGAL a activé plusieurs leviers : appel à des volontaires d’autres régions, mobilisation de référents nationaux et embauche de quelques contractuels.
L’appel à volontaires, réitéré compte tenu de la période estivale où certains n’étaient pas disponibles, permet d’ores et déjà de mobiliser des agents qui vont venir prêter main forte à tour de rôle pendant une à deux semaines en tout cas jusqu’à la fin de l’été. Une dizaine d’entre eux pourrait être mobilisée d’ici fin août selon la DGAL.
La DGAL a redéployé la volumétrie de trois équivalents temps plein, « prélevés » sur plusieurs DRAAF, pour appuyer le SRAL de la DRAAF AURA : six contractuels vont ainsi pouvoir être embauchés jusque fin 2025 dans le cadre de la gestion de cette crise.
Une organisation syndicale s’interroge sur la possibilité de mobiliser l’article 61 pour recruter davantage de contractuels, piste que n’écarte pas Maud Faipoux.
Elle indique également que l’ENSV effectue un travail de mobilisation des élèves stagiaires, en particulier pour apporter leur aide lors de la campagne longue de vaccination qui vient de commencer.
La CFDT s’interroge : ces renforts sont-ils suffisants ? que se passera-t ’il si la crise s’amplifie, et que le nombre de foyers augmente ? De nouveaux renforts seront-ils mobilisables ?
Les moyens sont-ils à la hauteur pour que les agents des services arrivent dans les élevages avec des véhicules conformes à toutes les règles de biosécurité ?
Afin de faire des économies, depuis des mois, les restrictions en matière de déplacements, d’achat et d’entretien de véhicules sont de plus en plus systématiques. La CFDT-Agriculture souligne qu’il ne faudrait pas que cette situation d’économies forcenées conduise un jour les DDI à négliger le nettoyage et la désinfection des véhicules intervenant dans les élevages, au risque de participer à la dissémination de contaminants… des insectes, stomoxes ou taons, par exemple ? Quelle serait la crédibilité des services de contrôle s’ils se trouvaient un jour être responsables de la propagation de la maladie ?
Pour la CFDT-Agriculture, il est temps que la ministre de l’Agriculture intervienne auprès de son homologue du ministère de l’Intérieur pour qu’il abonde les crédits du BOP 354, demande maintes fois réitérée depuis plus d’un an par notre organisation syndicale….
Référents nationaux en gestion de crise : déploiement de deux d’entre eux sur place
Pour mémoire, la CFDT a porté inlassablement la nécessité de la création de ces postes à partir de l’été 2022, et elle a été entendue sur ce point par la DGAL : 6 référents nationaux ont pris leur poste en 2024 et 2025, et deux sont actuellement déployés sur la gestion de cette crise. Leur mobilisation active sur le terrain aujourd’hui montre le bien-fondé de la persévérance de la CFDT sur ce sujet.
Heures supplémentaires, astreintes, indemnité de gestion de crise… quelles indemnisations au regard de l’engagement des agents ?
La CFDT demande si, comme le recommandait le rapport du CGAAER sur la gestion de crises, l’enregistrement des heures travaillées est bien effectué pour tous les agents concernés, et s’il y a une mise en place formelle d’astreintes les week-ends et jours fériés pour les agents qui restent disponibles pour gérer la crise.
Maud FAIPOUX répond de manière affirmative, ce que ne semblent pas confirmer les retours de terrain dont notre organisation syndicale est destinataire.
La CFDT-Agriculture a donc invité Maud FAIPOUX à s’assurer que toutes les dispositions soient prises pour que les enregistrements soient bien réalisés, afin que les agents soient rémunérés à hauteur des heures supplémentaires et astreintes qu’ils auront effectuées.
Notre organisation syndicale s’interroge également sur la réflexion d’attribution par l’administration d’une indemnité de gestion de crise, à l’instar de la prime dont ont pu bénéficier les agents en SEA suite à la crise agricole, ou les agents mobilisés dans le cadre des JOP 2024 ?
Maud FAIPOUX répond que cette piste n’a pas encore été étudiée pour le moment, et que cela viendra dans un deuxième temps.
La CFDT-Agriculture sera vigilante sur les suites apportées à cette demande d’activation de levier indemnitaire, dès lors que les conditions de mobilisation exceptionnelle des agents dans la durée sont réunies.
Et l’après crise ?
La CFDT-Agriculture appelle l’attention de Maud FAIPOUX sur les difficultés que rencontreront probablement également les agents en période post crise, avec une surcharge de travail liée aux tâches habituelles qui n’auront pas pu être faites pendant la crise. Cette donnée devra impérativement être prise en compte le moment venu.
Maud FAIPOUX conclut la réunion en réaffirmant que ses services sont pleinement mobilisés. Elle ajoute qu’un RETEX sera effectué et partagé avec les organisations syndicales, ainsi qu’il est prévu après chaque crise.
A l’origine de la demande de cette réunion en toute urgence, la CFDT-Agriculture remercie Maud FAIPOUX pour sa réactivité et l’organisation rapide de cette rencontre. Celle-ci a permis de faire le point sur la situation sanitaire, très évolutive, mais aussi et surtout d’apporter un regard complémentaire sur les points de vigilance que la DGAL doit prendre en compte pour accompagner les agents impactés par cette nouvelle crise sanitaire.

