Rémunération des vétérinaires contractuels et des préposés sanitaires : une information parcellaire

Le groupe de travail relatif au nouveau référentiel de rémunération des vétérinaires inspecteurs contractuels et des préposés sanitaires s’est réuni le 16 avril 2019. Il était présidé par Noémie Le Quellenec, sous-directrice des carrières et rémunérations au service des ressources humaines du ministère de l’Agriculture, assistée d’Angélique Pluta, cheffe du bureau des personnels contractuels. Participaient également à cette réunion deux Igaps : Benoît Sermage (Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté), et Alain Schost (Centre-Val-de-Loire et Nouvelle-Aquitaine).

La CFDT y était représentée par Frédéric Nabucet et Cyrille Carayon.

Aucun document préparatoire n’a été transmis par l’administration aux organisations syndicales en amont de cette réunion. Les documents présentés par l’administration ont été découverts directement en séance, par projection et sans remise d’une version imprimée ; ils devraient être adressés ultérieurement par messagerie aux organisations syndicales. Ces conditions ne pouvaient donc guère augurer d’un dialogue social constructif.

Ce qu’on peut indiquer d’ores et déjà, c’est que la rémunération des contractuels vétérinaires et des préposés sanitaires a été réévaluée rétroactivement au 1er janvier 2018. Il n’y avait pas eu de revalorisation depuis 2010.

Pour les préposés sanitaires contractuels, le seuil de recrutement a été réévalué de 18 points ; il passe de l’indice 331 à 349. En moyenne, un agent travaillant à 100% et présent au 1er janvier 2018 bénéficie de 18 points d’indice complémentaires, soit 84 € bruts.

Pour les vétérinaires contractuels, cette révision a pour conséquence la revalorisation de 10 points du seuil indiciaire de recrutement. En moyenne, un agent travaillant à 100% et présent au 1er janvier 2018 bénéficie de 16 points d’indice complémentaires. Le complément indiciaire (perçu par 90 vétérinaires contractuels sur un total de 525) varie entre 22 et 31 points (103 et 145 € bruts) et sera désormais fonction du classement des postes au sens du parcours professionnel.

Malheureusement, au-delà de ces éléments parcellaires, l’administration a refusé de communiquer l’intégralité de la grille (référentiel), malgré la demande explicite de la CFDT ; il a donc été impossible d’apprécier avec justesse l’amplitude de cette revalorisation. Pour les préposés sanitaires, tout laisse à penser que seul l’indice de recrutement est modifié et que le reste du référentiel est inchangé. Pour les vétérinaires, 31 points d’indice supplémentaires par échelon auraient été accordés.

Il est surprenant qu’une réunion dont l’objet est la présentation du nouveau référentiel de rémunération des vétérinaires contractuels et des préposés sanitaires se traduise par la non-communication dudit référentiel. On aurait pu faire l’économie d’une telle réunion.

L’hypothèse d’une attribution de primes aux contractuels n’a pas été retenue par l’administration. C’est pourtant une demande légitime, en termes d’équité de traitement, que la CFDT porte depuis des années, pour tous les contractuels.

En conclusion, ces revalorisations représentent une avancée minimaliste ne couvrant même pas l’inflation; elles sont loin d’être à la hauteur des attentes des agents et des enjeux pour l’administration (attractivité des postes en abattoirs). Ce n’est pas l’opinion de l’Igaps Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté, qui a qualifié cette revalorisation de « conséquente et substantielle »…


No Deal au CTM !

Après le groupe de travail consacré au Brexit le 7 mars 2019, le comité technique ministériel (CTM) du 10 avril 2019 a lui aussi été intégralement consacré à ce brûlant sujet d’actualité, sous la présidence de Sophie Delaporte, secrétaire générale du ministère de l’Agriculture.

La CFDT y était représentée par Gisèle Bauland, Jacques Moinard, Stéphanie Clarenc et Philippe Hédrich.

En préambule, la CFDT a lu la déclaration liminaire suivante :

« En raison du Brexit et du rétablissement d’une frontière entre le Royaume-Uni et l’Europe, plus de 10 postes frontaliers ont été ouverts, où le ministère de l’Agriculture envisage d’étendre les horaires 24 h sur 24 et 7 jours sur 7. Cinquante ETP ont également été recrutés et formés.

Or, en dehors du Brexit, il n’existe guère plus d’une trentaine de postes frontaliers et d’une centaine d’ETP pour réaliser les contrôles sanitaires sur plus de 42 000 lots d’animaux et produits animaux et plus de 53 000 lots de végétaux contrôlés à l’importation en 2018. Ces lots sont issus de plus de 165 pays tiers. En outre, face à de tels flux, aucun poste frontalier ne fonctionne 24 h sur 24 et aucun poste frontalier supplémentaire n’a vu le jour depuis plusieurs années.

Dans ce climat d’incertitudes abracadabrantesques qui règne sur le Brexit, le dispositif de contrôle élaboré, du fait des horaires d’ouverture, engendre une organisation et des horaires de travail peu compatibles avec la santé des agents et la qualité de vie au travail.

À noter que ce dispositif a été élaboré sans connaissance précise des flux de marchandises mais surtout de leur conditionnement. Or, le temps d’un contrôle n’est pas le même lorsqu’un envoi comprend un seul produit ou plusieurs produits et qu’il est nécessaire de sortir les palettes du camion afin de trouver les denrées à contrôler.

Tout ce dispositif « Brexit » paraît disproportionné face à un risque sanitaire faible puisque le Royaume-Uni continuera, dans un premier temps, d’appliquer les règlements européens à l’importation.

Dans ces conditions et afin de fluidifier la circulation des marchandises, d’autres solutions ne sont-elles pas envisageables ? Certains contrôles ne pourraient-ils pas être réalisés à destination ou encore dans un autre poste frontalier ? Moyennant, pour certains produits, une dérogation temporaire de l’UE et ce, le temps de la transition avec le Brexit et de trouver l’équilibre.

Pour la CFDT, l’ouverture des postes frontaliers sur des plages horaires aussi étendues doit rester une exception et les cycles de travail proposés par l’administration doivent être temporaires avec une échéance de fin stricte afin d’inciter la chaîne commerciale à s’organiser.

Ce dispositif est également source de disparité entre les postes frontaliers, notamment Roissy, ouvert le samedi et le dimanche avec un dispositif de récupération plus avantageux que celui proposé dans les projets de texte présentés. De surcroît, certains transitaires pourraient réclamer des horaires d’ouvertures équivalents dans les postes frontaliers actuels.

Enfin, la mise en place de ces contrôles, avec des postes frontaliers ouverts 7jours sur 7 et 24 h sur 24 a un coût, sans compter le temps passé à analyser les différents scénarios, à organiser les contrôles, à former les agents à ces contrôles. La CFDT souhaiterait avoir une évaluation du budget consacré et de son impact sur les équipes en charge de ces dossiers, déjà en tension et mises en surtension avec le Brexit. »

Deux textes inacceptables sur le long terme

L’administration a ensuite présenté au CTM deux projets modifiant les deux arrêtés du 18 octobre 2001 relatifs aux cycles de travail et à l’aménagement du temps de travail (arrêté du 18 octobre 2001 portant application du décret n° 2000-815 du 25 août 2000, et  arrêté du 18 octobre 2001 relatif aux cycles de travail).

Pour la CFDT, ces textes ouvrent la porte à une dérogation aux garanties minimales édictées par les arrêtés de 2001, concernant la durée quotidienne du travail, l’amplitude de la journée et le repos hebdomadaire.

La CFDT aurait accepté ces textes pour une durée limitée de trois mois, le temps de faire face à l’urgence et à la complexité de la situation, moyennant l’établissement d’un comité de suivi chargé d’en conduire l’analyse. Sans accord sur cette limitation à 3 mois, la CFDT a décidé, comme les autres organisations syndicales, de voter contre ces deux textes.

Dans ces conditions, les organisations syndicales Unsa, CFDT, CGT, Alliance du Trèfle, FSU, FO et Sud ont interpellé la secrétaire générale du ministère de l’Agriculture via la déclaration unitaire suivante :

Communiqué intersyndical suite au CTM spécial Brexit du 10 avril 2019

« Les organisations syndicales ont voté unanimement contre les 2 projets de textes présentés au CTM du 10 avril.

Ces textes comportent un risque de recul pour tous les agents. Ils dérogeraient aux cycles de travail du ministère en charge de l’Agriculture, avec allongement de la durée légale du travail hebdomadaire (44h) et en supprimant les compensations actuelles : récupération majorée des samedis (1,5), dimanches et jours fériés (2).

Le gouvernement n’a pas envisagé la mise en place de mesures pour prendre en compte la pénibilité induite. Faire passer les samedis, les dimanches, les jours fériés et le travail de nuit comme des cycles de travail normal permet au ministère d’éviter les recrutements nécessaires.

Parallèlement à ces dégradations, l’administration n’a pas étudié l’impact de ces conditions de travail, sur la santé et la vie personnelle des agents.

Pour preuve, le CHSCT de la veille a été annulé sans motifs !

Enfin, le texte supprimant les compensations, présenté au CTM pour le Brexit, est susceptible de s’appliquer à tout agent dont le cycle prévoit le travail du samedi, dimanche et des jours fériés.

Nous considérons, à ce stade, que les dispositions légales actuelles permettent de faire face à la situation, d’autant plus que la date du Brexit vient à nouveau d’être repoussée. Nous attendons du ministère qu’il mette en place les moyens adaptés.

Conformément à la réglementation, l’administration devra convoquer une nouvelle réunion du CTM d’ici 30 jours. »


Et pour quelques euros de moins, le mauvais film du bureau du cabinet

 

Certains personnels du bureau du cabinet, comme les chauffeurs et les assistant⋅e⋅s, sont, par la nature de leur travail, soumis à des contraintes horaires, des contraintes de disponibilité ou encore des contraintes spécifiques à l’emploi occupé. Ces contraintes sont en principe compensées par une indemnité de sujétion particulière (ISP). Il s’agit d’une indemnité forfaitaire visée au décret n° 2001-1148 du 5 décembre 2001 qui est destinée à rémunérer les sujétions particulières supportées par les personnels titulaires ou non titulaires des cabinets ministériels dans l’exercice de leurs fonctions.

À ces contraintes spécifiques s’ajoutent, pour certains personnels, des périodes d’astreintes.

À titre d’exemple, les assistant⋅e⋅s étaient d’astreinte, à tour de rôle, pendant une semaine complète, du vendredi midi au vendredi midi suivant, avec présence obligatoire au ministère le samedi matin. Cette astreinte hebdomadaire, y compris la permanence du samedi matin, avait pour contrepartie un jour et demi de repos compensatoire.

Ces jours de repos compensatoires sont dans le collimateur de la hiérarchie, qui souhaite les supprimer purement et simplement, arguant d’une part que la présence le samedi matin n’est pas utile, d’autre part que la plupart des astreintes ne débouchent pas sur une intervention effective de l’agent. Dès lors, avec la rigueur que l’on connaît dans les républiques bananières, le bureau du cabinet décide, en septembre 2017, de supprimer la permanence du samedi matin mais de maintenir l’astreinte hebdomadaire, moyennant la suppression pure et simple des 1,5 jours de repos compensatoires.

La méthode utilisée par le bureau du cabinet laisse perplexe car les intéressés n’ont pas été consultés, ni même informés. Il faudra qu’en septembre dernier, quelques agents de retour d’astreinte s’étonnent de ne pas voir apparaître de repos compensatoire sur leur compte pour qu’ils en apprennent, de façon brutale, la suppression pure et simple.

Saisie par quelques assistant⋅e⋅s du cabinet, la CFDT s’étonne de cette modification unilatérale des astreintes, qui met les agents devant le fait accompli sans concertation aucune. Selon son analyse, une telle modification doit être validée d’une part par une mise à jour du Rialto et d’autre part par une conformité aux textes en vigueur.

Rappelons que, d’un point de vue réglementaire, aux termes de l’article 5 du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l’État et dans la magistrature, « une période d’astreinte s’entend comme une période pendant laquelle l’agent, sans être à la disposition permanente et immédiate de son employeur, a l’obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d’être en mesure d’intervenir pour effectuer un travail au service de l’administration, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ». Cet article prévoit que les modalités de la rémunération ou de la compensation de l’astreinte sont précisées par décret. En l’espèce, il s’agit du décret 2002-756 du 2 mai 2002 (versement d’une indemnité d’astreinte de 25 € par jour).

Qu’à cela ne tienne ! Le bureau du cabinet bricole alors un Rialto sur mesure. Il y est question d’indemnisation de l’astreinte… mais seulement pour les agents non bénéficiaires de l’ISP !

Ainsi, selon le bureau du cabinet, « l’astreinte est indemnisée soit au titre du décret n° 2001-1148 du 5 décembre 2001 (versement d’une indemnité de sujétions particulières) soit au titre du décret n° 2002-756 du 2 mai 2002 (versement d’une indemnité d’astreinte) ».

L’analyse conduite par la CFDT, confirmée par son cabinet d’avocats, montre que cette rédaction n’est pas conforme aux textes.

En effet, l’article 1 al. 2 du décret n° 2002-756 du 2 mai 2002 vise spécifiquement l’indemnité d’astreinte, qui est « exclusive de tout autre dispositif de rémunération ou de compensation horaire attribué au même titre ». Il ressort donc que l’astreinte hebdomadaire doit être effectivement indemnisée sur le fondement de ce décret.

Le 10 avril 2018, la CFDT interpelle le ministre Stéphane Travert, en demandant son intervention pour une mise en conformité de ce nouveau règlement intérieur avec les textes. Le ministre se garde bien de donner réponse, et le 19 avril, le bureau du cabinet présente son projet au comité technique.

La CFDT y pose la question de la non-conformité des textes ; elle se voit répondre que d’autres ministères procèdent de même et que ça ne pose pas de problème.

Seule la CFDT s’oppose à l’adoption du projet. Le Rialto nouveau est donc validé…

La CFDT regrette le silence du ministre sur ce sujet et le lui fait savoir par un deuxième courrier (reproduit ci-dessous).

Cette attitude montre combien, avec ce gouvernement et des cadres aux ordres, le dialogue social est régulièrement mis à mal malgré des effets d’annonce tendant à démontrer le contraire. Mais, au-delà de cette constatation, on peut légitimement être consterné par une mesure dont l’apport à l’obligation d’économies demandée aux ministères est infinitésimal.

En résumé, c’est un mauvais film, qui pourrait s’intituler Et pour quelques euros de moins, et dont il n’est pas sûr que le comique de situation fasse rire les intéressés.

 

Le courrier adressé au ministre par la CFDT :